Épisode 37 – Dispute
Oh, non. Pourquoi faut-il que la malchance s’abatte sans arrêt sur moi ? Je ne bouge pas, redoutant le fait que les Night Warriors s’orientent vers nous. J’aimerais tellement déserter au plus vite d’ici, mais malheureusement, ma voiture n’est pas là. Miséricorde ! Autrement dit, la poisse ! La fatalité de mon destin m’anéantir à petit feu.
— Non, ça va aller. Elle va bien. Cette fille est plutôt coriace, crois-moi. Affirme Phoenix, essayant d’éloigner son groupe d’ami. Elle va se réveiller, enfin j’espère…
Il ne fait qu’empirer davantage la situation, plus qu’elle ne l’est déjà. Merci Phoenix. Quel crétin ! Bon, tant qu’on y est. Je vais faire semblant d’être évanouie. Ainsi, endormie : Wayne ne pourra pas me parler. Quelle ingénieuse idée, Early ! Je ferme les yeux et décontracte mes muscles. C’est dans ces moments-là que j’aurai préféré porter un masque. Tout serait plus simple.
— Je ne veux pas vous déranger ! Poursuit Phoenix. Je suppose que les Night Warriors sont là, près de nous.
— Mais non, ne t’inquiète pas. C’est la baraque de notre pote ! Dit Carter, avec enthousiasme. On va aider ta petite-amie.
Petite-amie ? Cette situation commence sérieusement à dégénérer. Je voudrais m’enterrer vif. Là, maintenant. Le pire dans tout ça est que Phoenix est gay, alors sa remarque doit certainement rester en travers de la gorge, tout comme moi. Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu pour mériter ça ? Soudain, une main se pose brusquement sur mon menton pour le relever. Je frissonne au contact de sa peau glacé. Mes paupières sont toujours closes bien que je fus surprise de ce geste.
— Son visage est pâle. Rétorque le propriétaire de la main se tenant sur mon menton.
— Nan. Sans blague, sherlock ? T’es pas le seul à l’avoir remarqué, Kayden. Dit Carter d’un ton sarcastique. Bon, faut qu’on l’emmène dans la chambre d’invité, ça sera la bonne action du mois. Donc. Qui se décide à la porter en sachant que le but n’est pas de la faire tomber, n’est-ce pas Glen ?
— Oh, mais c’est arriver qu’une seule fois ! Ricana logiquement le dénommé, Glen.
— Je m’en occupe. Je pourrais reconnaître sa voix entre mille : Wayne.
— Vraiment ? Toi, Wayne Perkins. Dit l’un d’entre eux, d’un ton amusé.
— Ferme-là, Seth. Déclare-t-il.
— Ce serait pas plutôt logique que ce soit son petit-ami qui la porte ? J’dis ça, j’dis rien. En analysant sa voix, il me semble qu’il s’agit de Kayden.
Quand tout à coup, je sens mon corps se tenir en élévation. Des mains me soulèvent et un parfum enivrant parvient jusqu’à mes narines. J’en viens à conclure, d’une vitesse époustouflante, que Wayne me porte. Ça ne peut être que lui. Ma tête se pose malencontreusement sur son torse, pendant que les discussions continuent. J’entendis la musique résonner. De ce fait, j’en déduis que nous venons d’entrer dans la maison. Je me fais violence de ne pas ouvrir les yeux afin de ne pas attiser la curiosité de certains. Après quelques instants de marche, mon corps est désormais en contact avec un lit.
— Hé mais attends, ce ne serait pas la fille qui connait l’identité de The Wanted ? Dit une personne, subitement.
Oh, merde. Je continue de ne pas bouger, intéressée par leur conversation. Étrangement, les battements de mon cœur se multiplient. Probablement, car je ne m’attendais pas à une telle question qui n’en ait pas réellement une, étant donné que je suis pratiquement sûr que la personne sait que je suis la soi-disant fille qui sait le nom de la traîtresse. En effet, ses paroles sonnent affirmatives.
— Ouais.
— Le plan a fonctionné, tu as réussi à lui soutirer des informations ?
Comment ça, un plan ? C’est peut-être pour cela qu’il souhaitait boycotter ma chambre : il voulait des réponses sur The Wanted. Mais, pourtant, si ma mémoire ne me fait pas défaut : il ne m’a pas interrogé sur ce sujet. Son but était sûrement de gagner ma confiance. C’est la seule hypothèse qui m’est cohérente… Pathétique, franchement.
— Non… Têtue comme elle est, crois-moi, c’est perdu d’avance. Dit Wayne en soupirant bruyamment.
— On peut y remédier, si tu…
— Aucun de vous ne fera quoi que ce soit, c’est clair ? Je sais régler mes propres problèmes, quand même. Si j’apprends que l’un de vous l’a touché, vous êtes foutus. Il coupe la parole à son ami avant de continuer. Surtout toi, Brend.
Attendez. Mais, où est Phoenix, au juste ? Il ne m’a tout de même pas laissé ici, avec les Night Warriors ? Si c’est le cas, je vais l’étrangler dès le moment où je le verrai. Et dire que je le complimentais intérieurement, quelques minutes plus tôt. Saleté de Phoenix !
— Je suis désolé… J’étais bourré, et le fait que tu ais accepté de faire un accord avec cette manipulatrice… Ça m’énervait. La voix de Brendon retentit pour la deuxième fois de la soirée.
Un silence envahit la pièce. Doux jésus, je veux rentrer chez moi !
— Et maintenant, qu’est-ce que tu vas faire ? Demande Carter tandis que je tente de trouver un moyen de m’en aller de cette fête, en vain. C’est impossible. Je suis piégée !
— Faut que j’lui gueule dessus pour m’avoir fait glander devant chez elle, pendant trois semaines. Vous n’aurez pas un sceau d’eau glacée, par hasard ? Rétorque Wayne, tandis que je me force pour ne pas ouvrir les paupières.
Pardon ? Il est inconcevable que je termine toute mouillée à une soirée, encore une fois. Il faut que je parte d’ici ! Mais, comment ? Si seulement j’avais su plus tôt que cette fête a été organisée par Terence, c’est sûr que j’aurai refusé. Tyler ! Maudit soit-il. D’ailleurs, je pense qu’il est toujours en compagnie de Levi. Intéressant… Hein ? Mes pensées devraient être plutôt centrées sur le fait que Wayne s’apprête à me balancer un seau d’eau en guise de vengeance.
— Tiens, Wayne. Je savais que tu allais demander ça. Rit un garçon en faisant vraisemblablement référence au seau d’eau.
— Merci, bro. Ajoute-t-il. Bon, les gars, vous pouvez partir. Profitez de la fête !
Après plusieurs secondes, j’en viens à conclure qu’il ne reste plus que Wayne. Je gigote légèrement, trouvant cette situation assez embarrassante. C’est sûr. Je vais trucider Phoenix.
— Ouvre les yeux, ou j’te balance de l’eau en pleine tronche. Dit Wayne, d’un ton plus que sérieux.
Il est con, ou ça se passe comment ? Je ne peux pas ouvrir étant donné que je suis censée être évanouie. Bruh. Par conséquent, je n’ouvre pas les yeux.
— Tu baves. Remarque-t-il.
Quoi, vraiment ? Je bouge furtivement mes lèvres, constatant qu’il ment. Je ne bave pas ! Il vient de mentir.
— Tu t’es fait griller, crétine. Je suis prête à parier qu’il est en train de se moquer de moi.
Et là, mes membres se crispent lorsque de l’eau glaciale touche chaque centimètre de ma peau. J’ai horriblement froid. Quel connard ! Il a osé faire ça. Mes vêtements sont complètement mouillés de sa faute, argh. Je me redresse rapidement, un sentiment de colère envahit mon corps, à l’instant où je vois son sourire mesquin.
— Va te faire foutre ! Je hurle, énervée.
— C’est de ta faute. Fallait ouvrir les yeux plus tôt. Déclare-t-il en posant le sceau par terre.
— Je m’étais évanouie ! Comment tu veux que je me réveille ? Je grogne en me levant pour partir hors du lit en découvrant le désastre, ma robe est imbibée d’eau.
— Personne ne s’évanouit accroupi, j’suis pas con non plus. Il marque un point. J’avoue qu’il n’a pas tort. Bref. Peu importe ! Explique-moi pourquoi tu m’as laissé dehors, hein ? Pendant trois semaines, et un mois d’octobre en plus. Il gèle dehors, j’te signale.
— De toute façon, ça sert à quoi que tu viennes dormir chez moi ? Je riposte en croisant les bras contre ma poitrine. Je ne suis pas un hôtel !
— Encore heureux. T’aurai jamais de client vu comment tu me traites ! Wayne hausse le ton. Et pour l’énième fois, je viens m’assurer que mes amis ne viennent pas foutre la merde, c’est tout. Ce n’est pas compliqué à comprendre.
— Tu n’as qu’à leur dire de ne rien faire et basta ! Plus personne n’est venu chez moi, pendant ces trois semaines. Dis-je avant de soupirer.
— On ne sait jamais.
— Mais, bien sûr ! Avoue que tu viens dans l’unique but de me soutirer des informations, n’est-ce pas ? Je ne suis pas sourde, Wayne. L’atmosphère est palpable.
— C’est bon, calmos !
Donc, concrètement, cela signifie que mes propos précédents sont justes. Je ne sais pas ce qui m’empêche de ne pas lui foutre un poing dans la gueule. Ah si, je sais. Je n’ai pas suffisamment de force. Ugh. Dommage, c’était tentant…
— Quoi, tu rigoles, j’espère ? Je ne vais pas me laisser manipuler par quelqu’un comme toi ! Ma voix augmente en tonalité de plus en plus. Salopard !
— Vas-y, répète pour voir.
— Salopard. J’ai dit que t’étais un salopard, tu n’entends pas assez bien ? Sa mâchoire se contracte tandis que ses jointures deviennent pâles.
— J’crois que t’oublies à qui tu parles, Early. A-t-il annoncé. Évite de me mettre à bout, si tu tiens encore à la vie.
Il est sérieux et pourtant, je trouve le moyen de le provoquer : c’est plus fort que moi.
— Oh, une menace de mort. Peu originale de ta part, Perkins. J’insiste sur la prononciation de son nom de famille.
— T’es vraiment suicidaire, Turner.
— Oui, je sais déjà ça. Merci de m’le rappeler. Mon ton est désormais sarcastique.
— Donc comme ça, tu me tiens tête ? Il arque son sourcil gauche.
— Ouais, et alors ? Je prends un air hautain en le dévisageant. Bref, tu m’as soûlé. Je m’en vais.
C’est sûr ces mots que je m’oriente vers la porte, mais malheureusement, Wayne m’interrompt.
— Eh, attends ! On n’a pas fini, reste ici.
— Oh que si, on a fini. La discussion est close, maintenant, lâche-moi. Mon ton est sec et ferme.
Il détache mon emprise et je quitte la pièce à toute allure en m’orientant vers le hall d’entrée. Je n’ai jamais été autant en rogne de toute ma vie, et après m’être défoulée, j’en reviens à conclure que : Wayne est un véritable connard. Sous ses airs de beau garçon se trouve un manipulateur ainsi qu’un meurtrier. Ce type a déjà tué quelqu’un, mince alors ! Ce n’est pas rien. Malgré ça, je sais qu’il ne me fera pas de mal, puisque sans moi, il ne peut pas arriver à ses fins. Tout simplement. Dès qu’il trouvera The Wanted, il me tuera, sans aucun scrupule. Wayne ne détient pas de cœur, ni même de pitié.
Il faut savoir que ça fait près de trois semaines que ma haine à son égard s’agrandit, et ce soir, c’est la goutte qui a débordé le vase. Je n’arrive pas à me calmer. J’ai des envies meurtrières sérieusement. Il faut que je prenne l’air ou que je boive quelque chose.
— Early ? Il s’agit de Terence. Ses yeux scrutent ma tenue brièvement. Pourquoi es-tu trempée ?
— Demande à ton meilleur ami, Wayne. Je grogne en le voyant soupirer de frustration.
— Quel cruche, celui-là ! Oh, le voilà qui arrive. Déclare Terence.
Mon instinct me dit de fuir, il est hors de question que je me trouve à nouveau face à lui. J’ai assez crié dans la soirée. Je fais un pas près de la porte, mais Terence m’en empêche en me bloquant. Mais, qu’est-ce qu’il lui prend ? La seconde qui a suivi, Wayne se trouve à côté de nous.
— Pourquoi t’as fait ça ? À cause de toi, elle va attraper froid. Dit Terence, je me tourne vers Wayne à contrecœur.
— Au moins, comme ça, elle pourra savoir ce que j’ai ressenti lorsque je restais dehors toute la nuit. Et puis, elle n’avait pas qu’à prétendre d’être évanouie. Affirme-t-il.
— Hein, quoi ? Je n’y comprends rien. Terence semble confus.
— Et toi, tu n’avais pas qu’à embrasser Ashlyn ! Je dis cela sur un coup de tête.
Merde, merde, merde ! Qu’est-ce qui m’a pris de dire ça ? J’ai tellement honte. Et encore une fois, j’aimerais m’enterrer vif pour ne plus faire face à cette situation, qui plus est, embarrassante.
— Non, j-je… J’essaye de me rattraper, en vain.
— Bon les gars, euh… J’suis perdu là. Déclare Terence, ne sachant pas quoi faire.
— Donc, c’était pour cette raison que tu refusais de me laisser entrer, juste parce qu’elle m’avait embrassé… ! Tu es jalouse, avoue-le. Révèle Wayne, visiblement amusé de la situation.
— Non, je ne le suis pas.
— Si tu l’es. Affirme-t-il en riant.
— Non. Arrête de rigoler, ce n’est pas drôle !
Maintenant, il va penser que je l’aime. Il ne manquait plus que ça pour que la soirée soit qualifiée comme étant catastrophique. Bon, j’en ai assez. Il faut que je trouve Levi pour partir d’ici, loin de Wayne qui s’est fait des conclusions beaucoup trop hâtives. Je m’éloigne, mais Wayne me devance.
— Si ça peut te rassurer de le savoir : je te préfère à Ashlyn. Un sourire vicieux honore son visage.
— Je m’en fiche ! Je ne t’aime pas, crétin. Je le fusille du regard en voyant qu’il semble toujours autant amusé. Bon, sur ce, je vais rejoindre mon petit-ami.
Son sourire s’efface immédiatement. C’est marrant de voir sa réaction.
— Tu veux dire… le gars de tout à l’heure, t’es sérieuse là ?
— Alors, jaloux ? Dis-je en souriant machiavéliquement.
— Non, pas du tout. Il rétorque en hochant négativement de la tête. C’est juste que je l’aie déjà vu embrasser un mec à une fête, donc…
Je tente de garder une expression neutre face à sa remarque, bien qu’en ce moment même, je sois actuellement en train d’hurler intérieurement tous les jurons que je connaisse à mon insu. Quelle idiote ! Je perçois un rictus sur ses fines lèvres, tandis que je me sens soudainement perdue. Qu’est-ce que je fais encore ici, là, devant lui ? Je veux dire… mon attitude ainsi que la sienne est tellement incompréhensible. Quelque minute plus tôt, nous étions en pleine dispute, au bord de la menace de mort. Et là, on discute tranquillement de mon faux petit-ami, Phoenix. Décidément, je n’arriverais jamais à discerner la personnalité de Wayne. Il est tellement… imprévisible. Le simple fait de ne pas savoir à quoi il pense, là, maintenant, me ronge considérablement de l’intérieur. J’ignore mes intentions. Dois-je le fuir ? Je ne sais pas… C’est si confus dans ma tête. Dois-je prendre mes distances ? À quoi bon. Il me retrouvera toujours pour me soutirer des informations sans que je m’y attende. Dois-je l’ignorer ? Probablement. Mais, comment ? S’il me parle, une force incontrôlable me pousse à lui répondre. C’est plus fort que moi. Dois-je arrêter de me poser des tas de questions ? Je suppose que oui. Les yeux de Wayne s’immobilisent sur les miens, depuis un moment déjà. Pendant dans un instant, je me noie dans son regard : si intense, si profond.
— Je dois y aller. J’arrive enfin à construire une phrase correcte tout en fuyant son regard, mes paupières papillonnèrent : elles battirent aussi rapidement que mon cœur.
Bien que je suis consciente que la fête ne touche pas à sa fin avant plusieurs heures, une part de moi me dit que ma soirée devrait s’achever, et vite. Je dois m’en aller. Ma présence n’a pas sa place ici, après tout, toutes les personnes qui m’entourent me sont inconnues. Par ailleurs, je n’avais remarqué avant, mais certaines personnes ont les yeux braqués sur Wayne et moi. Du mépris, de l’antipathie, de la confusion : c’est ce dont je vois dans leurs regards. Ils se demandent certainement pourquoi je suis là, à côté de lui : le fameux leader du groupe de fauteur de troubles qui règne dans les rues d’UnderGlade lorsque la nuit est tombée.
— J’ai une meilleure idée, suis moi.
À ces mots, il saisit fermement mon poignet.