The Wanted

Épisode 22 – Davi’s Bar


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Trois semaines ont passé maintenant, depuis que je suis arrivée au lycée et j’ai la forte impression que tout semble différent de la première fois où je suis venue. Bien que ça ait été difficile, j’ai réussi à trouver mes repères. Du moins, seulement à l’école. Les rues sinistres d’UnderGlade restent toujours un mystère pour moi. Peut-être qu’un jour, je parviendrais à me promener sereinement dans cette ville. On ne sait jamais. Tout peut arriver, surtout dans un tel endroit.

Depuis ma dispute avec mon père, datant d’une semaine, nous nous ne sommes plus parlés. Son manque d’intérêt vis-à-vis du danger qui m’entoure m’exaspère. Je ne suis pas prête à le faire face sachant qu’il se fiche royalement de ma peur de mourir. Un père devrait être protecteur, mais j’imagine qu’il existe des exceptions dans la vie. Je souffle, agacée.

J’ajuste une dernière fois ma robe, dont le gérant du bar – étant par ailleurs, prénommé James, m’a offert. Je me maquille légèrement, ondule mes cheveux à l’aide d’un fer à boucler, enfile une paire de converses et quelques bracelets. Et me voilà, prête ! Mon ventre se noue dû à mon stress, tandis que mes mains sont tremblotantes. Je décide de ne pas prendre davantage attention à ce détail impertinent et me dirige en grandes enjambées vers ma chambre afin de prendre mon sac. C’est alors que mon cœur s’arrête littéralement.

Wayne est là, dans ma chambre. Mais, qu’est-ce qu’il fiche ici ? Je ne peux pas m’empêcher de contempler sa tenue. Simple, décontracté et diablement beau. Il détache son regard de l’écran de son portable et lève les yeux vers moi. Un sourire mesquin apparaît sur ses fines lèvres. J’essaye de formuler une phrase.

— Co-Comment tu as fait pour entrer ? J’interroge, manifestement ébahie.

— J’ai grimpé dans l’arbre, et il a suffi que je pousse sur la vitre pour ouvrir la fenêtre. A-t-il rétorqué comme si cela est tout à fait normal.

Décidément, je dois réparer cette fenêtre avant que quelqu’un ne vienne s’introduire dans ma chambre en pleine nuit. On n’est jamais trop prudent, n’est-ce pas ?

— Tu ne pourrais pas faire comme toute personne normale et entrer par la porte d’entrée ? Je déclare en saisissant mon sac détenant le strict nécessaire.

— Je ne suis pas quelqu’un de normal, sweetie. Dit-il. On n’associe jamais mon nom avec la banalité.

Quel prétentieux !

Par la suite, on se dirige vers la porte d’entrée pour se rendre dans la voiture de Wayne. Je prends soin d’éteindre toutes les lumières et de fermer la porte à clef derrière moi. Ces temps-ci, beaucoup de personnes étranges rodent dans les trottoirs. Du moins, plus que d’habitude. Enfin, bref. Je ne peux pas m’empêcher de grelotter légèrement à cause de la température de l’air étant assez basse. D’un geste hésitant, j’ouvre la portière du sublime véhicule demeurant d’un blanc immaculé, pour m’installer sur un siège, aux côtés du conducteur. J’ai l’étrange intuition que cette voiture a été volée, car en temps normal, Wayne se déplace toujours en moto. Mais, bon. Peu importe.

Wayne démarre le moteur tandis que je regarde à travers la vitre : le paysage. Le silence envahit l’automobile, je suis bien trop concentrée à observer les alentours pour entretenir une quelconque discussion. De plus, la présence de Wayne m’intimide toujours autant. Bien que notre entente ne soit pas si mal, je n’arrive pas à négliger le fait qu’il pourrait potentiellement me retirer la vie si mon secret part en éclat. Ça m’angoisse tellement de songer à cela. Soudain, la voiture s’arrête devant un bâtiment détenant des lettres en néon : The Davi’s Bar.

Wayne sort de la voiture, et je l’imite quelque instant plus tard. On s’oriente vers le bar public, toujours en silence. Lorsque l’on arrive au seuil de la porte, il se tourne vers moi.

— N’oublie pas : interdis de révéler ton véritable nom à James, ou bien, à qui que ce soit. D’accord ? A-t-il dit, ainsi le silence se brise.

— Ouais, je sais. C’est la troisième fois que tu me le dis. Je rétorque en essayant de produire de la chaleur en frottant les paumes de mes mains sur mes bras. Et puis, qu’est-ce ça peut faire si je dis mon prénom ? Tu m’as dit que les personnes de ce bar sont inoffensives.

Il se racle la gorge et passe sa main derrière sa nuque.

— Ah, euh… Il se pourrait que je t’aie menti à ce propos. Affirme-t-il, visiblement mal à l’aise.

Pour être honnête, je ne suis pas surprise. C’était assez prévisible qu’il ait des gens dangereux dans un bar, surtout dans celui-là. Je me contente d’acquiescer. À l’aide de ma main, j’empoigne la poignée de la porte afin de l’abaisser.

— Attends. Wayne m’interrompt. Fais attention à toi. Les gars ici, sont plutôt, malsains. Il poursuit en plantant ces yeux dans les miens, comme d’habitude.

J’opine. Et là, sans étonnement, Wayne enfile une casquette et des lunettes de soleil. Pour une raison qui m’est encore inconnue, celui-ci souhaite entrer dans ce bar sous anonymat. C’est d’ailleurs pour cela que je suis ici. Afin que James, le gérant, ne dévoile pas son identité à tous, je dois passer la soirée avec lui. Et croyez-moi, devoir supporter James ne m’enchante pas vraiment. D’après la description de Wayne : c’est un trentenaire, plutôt enveloppé, détenant un crâne dépourvu de cheveux, des yeux gris perçants et des dents jaunâtres.

On entre dans le bar et sans étonnement, le fameux James nous accueille. J’espérais que la description de Wayne soit exagérée, mais ce n’est pas le cas. Il est encore plus hideux et terrifiant que j’imaginais. Par pur réflexe, je me tourne vers Wayne, tout en mimant un air de stupéfaction et de dégoût sur mon visage. Je ne veux pas rester avec un homme autant horripilant que laid.

— Désolé… Wayne chuchote, ceci est suffisamment audible pour que je l’entende.

Nom de dieu. Je veux rentrer chez moi. Qu’est-ce qui m’a pris d’accepter cette faveur – sonnant plutôt comme un pacte ? Je baisse la tête et joue frénétiquement avec mes bracelets en essayant de masquer le malaise que je ressens à cet instant précis.

— Mon ami, te voilà ! Ajoute James, d’une voix rauque.

— Nous ne sommes pas amis. Fit Wayne, de manière froide et posée. Où est Shado ?

Je lève les yeux, à contrecœur, et croise les iris plus que déstabilisants de James.

— Sur le canapé, à côté du barman. Par contre, pour votre règlement de comptes. Ne le tue pas, je ne voudrais pas avoir un mort sur le dos. Ça risque de faire une mauvaise pub pour le bar. Annonce le gérant en s’adressant à Wayne.

C’est vraiment répugnant. Il ne pense qu’aux répercussions financières du bar : si jamais quelqu’un meurt. Ceci est absurde. Je recule pour être en retrait. Une chose est sûre, James ne m’inspire pas confiance.

— Oh. Mais, tu dois être Vicky, n’est-ce pas ? Tu es sublime dans la robe que je t’aie offerte. Me complimente James accompagné d’un sourire pervers qui en dit long sur sa personnalité.

Sans me rendre compte, mes mains sont accrochées au bras gauche de Wayne. Ce dernier ne montre aucun signe d’opposition, et reste droit comme un piquet. Mon cœur cogne énergiquement contre ma cage thoracique. Ma respiration est tout simplement, saccadée. Je voudrais tellement partir d’ici. Là, maintenant.

— Tu n’es pas bavarde, dit donc.

Je ne peux tout de même pas lui tenir compagnie ! Il semble tellement… maléfique.

— Qu’est-ce que tu vas lui faire ? La voix suave de Wayne retentit. Il fait référence à moi.

— Cela ne te concerne pas. Tu devrais rejoindre Shado avant qu’il ne parte pour de bon, cher ami.

— Réponds à ma question. Qu’allez-vous faire ? Dit-il, d’un ton nonchalant.

— Boire un verre, voyons. Nous sommes dans un bar, je te signale.

Wayne souffle bruyamment.

— Très bien.

C’est sûr ces mots qu’il partit en s’éclipsant dans la foule ahurissante de personnes. Non, non, non ! Ça y est. Je suis foutue. D’une manière inexplicable, le fait d’être au sein dans cet endroit avec Wayne me procurait un sentiment de sécurité. Mais à l’heure actuelle, je l’impression que la mort me guette. Mon cœur rate un bond, une nouvelle fois. L’angoisse m’envahit. Cette émotion de peur est en constante augmentation. Cette soirée risque d’être riche en rebondissements. Je ressens le besoin de partir de ce bar. Je dois le faire. Mais, d’un côté, je veux rejoindre Wayne, car le gérant est une véritable menace, pour moi. Ces arrière-pensées n’ont rien de bienveillance. C’est certain. Alors que je m’apprête à faire un pas, une main empoigne fermement mon poignet. James.

— Où penses-tu aller comme ça, ma jolie ? On va bien s’amuser ensemble, crois-moi…