Chapitre 30
CHAPITRE 30 Brusquement, la porte claque contre le ventail, sous nos regards ahuris. Je suis scandalisé par l’acte provocateur de Pearl – si bien que je suis perché dans un état entre la haine et l’incompréhension. Quand la voix cristalline de Chrissy résonne, la réalité s’abat brutalement sur ma personne, telle une violente gifle. — On devrait y aller avant que la situation ne dégénère ! J’hésite. Un moment de réflexion s’impose ! Aussitôt, je me fige en me concentrant davantage sur mes pensées, quitte à ignorer les interpellations de la petite brune. Dois-je réellement rejoindre Pearl pour éviter qu’elle foute le bordel ? Normalement, oui. Cette fille ne supporte pas les substances alcoolisées. Or, elle vient de boire en abondance et de manière rapide, un cocktail à base de rhum. De ce fait, c’est sûr que dans quelques minutes, son comportement va sérieusement s’aggraver. Cependant, une part de moi m’empêche de partir de cette cuisine. C’est comme une force imaginaire. Mon côté mesquin souhaite que Pearl assume entièrement ses erreurs et les lourdes conséquences pour m’avoir énervé. Mon ego est irréfutable et catégorique là-dessus : Mini-Hopkins doit se débrouiller seule. De plus, étant donné qu’elle passe son temps à me réprimander d’être omniprésent, à présent, je vais réaliser son vœu en la laissant tranquille. Tout simplement. Ceci n’a rien d’enfantin. Je fais seulement ce qui me semble être juste ! — C’est son problème, pas le mien, lâché-je en me dirigeant vers un frigo pour saisir une bouteille de bière. — T’es vraiment sérieux, là ? s’étonne Chrissy avant de reprendre. Je pensais que la lieutenante Hopkins t’avait chargé de surveiller sa fille ! — Et alors ? À l’entente de mes paroles, elle me lance un regard noir avant de déguerpir de la pièce, manifestement en furie. Je me contente de hausser les épaules, et d’ingurgiter une gorgée de ma bière. La froideur envahit mon organisme, tandis qu’un goût amer se mélange à ma salive. Je m’assois, silencieux, en faisant abstraction aux bruits parasites se trouvant certainement dans le salon. Le boucan s’amplifie au fil des minutes, malgré tout, je continue de rester calme face aux éléments actuels. Des cris de détresse, des fracas de verre et des encouragements hasardeux retentissent progressivement. Et puisque pleins de personnes ont fait irruption dans cette fête, désormais, la cuisine est bondée de gens. Je n’y prends pas attention. Honnêtement, ça m’est complètement égal que des filles soient en train de me mater et que Jared me raconte des anecdotes de sa vie à Paris. — Mec, tu m’écoutes ? me demande le bouclé en fronçant les sourcils. — Hein ? — C’est c’que je pensais… souffle-t-il en roulant des yeux. Alors, depuis tout ce temps, j’étais en train de parler dans le vide ! Tu aurais pu me prévenir, non ? — Qu’est-c’tu veux me dire, au juste ? lui questionné-je avec un ton étonnamment monotone. — Le boxeur Ashton Bennett est mort, hier soir. Mon attitude ne change pas suite à cette annonce. Jared pensait vraiment que j’allais fondre en larme pour ça ? Certes, je connais ce gars depuis mon plus jeune âge, mais ce n’est pas une raison. Le fait d’apprendre qu’il soit mort, je n’en ai strictement rien à foutre. Ce ne sont pas mes affaires ! Enfin… Bon, j’dois avouer que plus les secondes passent, et plus mon côté sans-pitié s’estompe. En toute sincérité, sa mort ne m’est pas signifiante. Ouais, je sais ! MES PENSÉES N’ONT AUCUN SENS : et j’en ai pleinement conscience. Mais, voilà, quoi. C’est dans ma nature d’être indécis. Il m’arrive fréquemment de dire des choses et de les contredire, genre dix minutes plus tard – par exemple, c’est comme le fait de vous sous-entendre que j’aime Pearl. Entre autres, mon esprit est assez perdu. Donc, priez de m’excuser pour avoir embrouillé votre cerveau avec tous mes propos contradictoires ! Dès lors où des souvenirs en sa compagnie apparaissent, je me crispe légèrement. Je me souviens qu’Ashton avait une petite famille aimante : une femme ordinaire, mais amusante, et un gosse de quatorze ans. Oh, merde. Depuis quand est-ce que je suis autant préoccupé par ce genre de détail ? Quand Roy et Dean sont morts, je m’en fichais royalement ! Argh. Qu’est-ce qu’il m’arrive, bordel ? En temps normal, je ne m’intéresse pas aux malheurs des autres. En fait, c’était presque instinctif : d’habitude, je m’en battais les couilles de leur problème. Mais, là… Serait-ce de la compassion que je ressens ? Sûrement. Je n’en ai aucune idée. — Il a souffert ? demandé-je doucement, sonnant pratiquement comme un murmure. — Je ne sais pas, peut-être, me dit Jared en étant tendue par notre sujet de conversation. Vous étiez plutôt proches, alors… Toutes mes condoléances, Devon. Je– — Oh, j’t’en prie. Épargne-moi tes excuses à deux balles ! Putain, tu sais à quel point je ne supporte pas ça. Je me lève de mon siège, balance ma bouteille en verre, et serre énergiquement mes poings. Tous les regards sont braqués sur moi. J’ignore. Question d’habitude. Une colère naissante bouillonne dans l’intégralité de mon être, tandis que Jared se contente de me fixer attentivement. Il sait que dans ce type de situation, il vaut mieux rester à l’écart. Quand ma rage est proche de l’explosion, il est tout à fait possible que j’en vienne aux coups. Et ce, sans que je puisse me contrôler. Mon impulsivité est un de mes plus sombres défauts. Je le déteste. Malheureusement, je ne peux pas le vaincre. Il est plus fort que moi. C’est notamment pour ça que l’on me considère comme dangereux. Une facette de moi-même est abominable. J’essaye constamment de la dissimuler. Néanmoins, lors de mes combats, elle réapparaît. C’est là que je deviens égalable à un monstre. Pourquoi ne pas arrêter les affrontements physiques, me diriez-vous ? Je ne peux pas. Me battre : c’est un besoin quasi viscéral pour mon âme. C’est la seule chose qui parvient à donner un sens à mon existence. Sans la boxe, je ne suis rien. Ma vie
Chapitre 29
CHAPITRE 29 Je t’… ! Putain. Pourquoi est-ce que je n’arrive pas à prononcer ces trois mots ? Ce n’est pas compliqué, tout de même. Il est clair que je ressens des foutus sentiments pour la chieuse, alors dans ce cas, pourquoi je suis incapable de dire ça à haute voix ? Parce que là, franchement, je suis paumé. Bordel. Ça m’énerve ! Je balance mon oreiller à l’autre bout de la pièce, et décide d’aller prendre un encas. Peut-être qu’avec des nutriments sucrés, je parviendrais à oublier ce sentiment désagréable. Aussitôt, je descends les escaliers, et m’oriente en direction de la cuisine pour m’attaquer aux placards intégralement remplis de gourmandise. Presque directement, je m’accapare d’une boite de cookies, sous le regard contrarié de la lieutenante Hopkins. Qu’est-ce qu’elle a, encore ? Dès qu’elle me fixe comme ça, c’est-à-dire, avec une certaine forme de réticence : ça veut automatiquement dire qu’elle souhaite entreprendre une conversation avec moi. Cependant, c’est mon rôle de prendre la parole, pas elle. Ne me demandez pas pourquoi, je ne suis pas dans sa tête ! — Quoi ? lui lancé-je en m’asseyant sur une chaise, face à elle. Tu veux un cookie ? Elle hoche négativement de la tête. Ça ne présage rien de bon ! Lorsqu’Elena se lève pour fermer correctement la porte, et vérifier que personne n’est là, une tonne de questions se bousculent dans mon esprit. Avec cette femme, je peux m’attendre à tout. En d’autres termes, elle est imprévisible. Il m’est impossible de deviner ses intentions, et c’est pour ça que je commence sérieusement à être craintif vis-à-vis de son éventuel discours moralisateur. — Est-ce que tu pourrais m’accorder une faveur ? me propose-t-elle en gardant une tonalité extrêmement basse. — Ça dépend si ça m’arrange, répondis-je en bouffant mon biscuit parsemé d’une multitude de pépites au chocolat. — Bien, commence-t-elle en se mettant devant moi. (Son assurance habituelle s’est totalement dissipée. Elena semble réellement préoccupée par quelque chose – si bien que cela m’effraie. Je le sens mal. ) Écoute. Je commets certainement une grave erreur, mais… serait-il possible que tu accompagnes Pearl à cette fête ? Forcément, suite à cette annonce, je m’étouffe avec mon cookie. Par chance, je n’étais pas en train de boire du lait ! Sinon, à l’heure qu’il est, Elena serait complètement trempée. Enfin, peu importe. Je tape vigoureusement contre mon torse, au-dessus de mes pectoraux, et tente de retrouver mon calme. BON ! Si votre mémoire n’est pas défaillante, vous devez sûrement vous rappeler du moment où Pearl était chagrinée de ne pas pouvoir se rendre à une fête avec ses potes, non ? Eh bien, le jour j est arrivé ! Et étant donné qu’après le kidnapping, la relation mère et fille est devenue assez tendue, Elena a finit par accepter la réclamation de Mini-Hopkins. — Tout ce que je te demande, c’est de t’assurer que Pearl ne consomme pas d’alcool. Alors, je t’interdis de passer ton temps à draguer des filles ! me réprimande-t-elle en me lançant un regard désapprobateur. Autant que l’on soit formel là-dessus : ce n’est pas moi qui drague les meufs, mais plutôt l’inverse ! Nuance. La plupart du temps, elles viennent directement à mon égard. Et ce, sans que je ne fasse quoi que ce soit. Autrement dit, je suis un aimant à fille ! Et malgré les idées reçues, cette fonction peut apporter des avantages comme des désavantages. Être irrésistible : ce n’est pas de tout repos ! — Attends, deux secondes. Si je comprends bien, tu veux que je débarque à une soirée d’adolescents en chaleur pour surveiller Pearl, même si ça s’peut que je sois en danger si mon identité est révélée à tous et que mon assassin me dégomme sur place ? Elle grince des dents, visiblement agacée par la tournure de la situation. Cette dernière croise ses bras contre sa poitrine, entreprend une pression sur l’îlot central, et laisse résonner un long soupir avant de dire : — Dans ce point de vue, mon idée paraît vraiment absurde. — Ouais, lâché-je en me ralliant à ses propos. Et puis, qu’est-ce qui te fait croire que je vais la protéger de toutes ces boissons alcoolisées, au lieu de m’amuser ? Faudrait que tu te mettes en tête que ça fait un moment que j’me suis pas barré de cette piaule. De ses yeux bleutés, elle me foudroie intensément. Toutefois, son regard s’adoucit. Ce changement d’expression me laisse stupéfait. Je fronce les sourcils en signe d’incompréhension. — Je l’aie vue, Devon… Cette peur dans tes yeux lorsqu’elle n’était pas là. Je l’ai vue. Tu peux te voiler la face autant que tu le souhaites, ça m’est égal. À présent, je sais que je peux compter sur toi en ce qui concerne la sécurité de ma perle, déclare-t-elle avant de reprendre. De plus, sache une chose, mon garçon, bien que parfois, il m’arrivait de te gifler et de hausser le ton, j’ai toujours cru en toi. Je sais qu’au fond, tu es quelqu’un de bien. Et que derrière cette facette de délinquant se cache un garçon perdu et torturé. Mon visage neutre ne reflète pas mes véritables ressentis. Croyez-le ou non, ses mots me touchent. Considérablement. Je réprimande un sourire, et me contente de soutenir son regard. Comme l’a déjà dit Thalia : la lieutenante Hopkins est une femme charmante et attentionnée. Et c’était indubitablement mal de la juger sans la connaître. — Il suffit d’une simple gorgée d’alcool pour que Pearl se réveille, avec aucuns souvenirs de la veille. Et elle en ait parfaitement consciente. Néanmoins, il se peut qu’elle succombe à la tentation. En état d’ivresse, Pearl a tendance à être bavarde, et à mettre son identité d’agent secret en danger. C’est pour ça que je veux que tu sois là pour empêcher le pire. — Euuh, tu peux lui interdire de partir à cette fête, et basta. Plus de problème. — Et pourrir ses rares moments d’adolescente normale ? Je ne pense pas que ça soit la bonne
Chapitre 28
CHAPITRE 28 J’en reste bouche bée. Totalement. Mon cœur rate un bond, tandis que je souris faiblement. Étant donné que je suis physiquement invalide pour le moment, je ne peux évidemment pas me lever. Par conséquent, je me contente de les observer, avec un sentiment de soulagement. Ils sont là. Et même si cela porte à confusion, non, il ne s’agit pas de l’équipe de bras cassé : mais, plutôt de mes amis. Jared, Chace, Aaron, et Wade. Vous vous en souvenez ? AH ! Décidément, faites un effort, tout de même ! Ils étaient là lors de ma fête surprise chez les Hopkins, et sont souvent présents durant mes combats de boxe. Ça y est ? Votre mémoire est de retour ? BIEN ! Peu importe si ce n’est pas le cas. L’important c’est qu’ils sont ici, à quelques mètres de moi, et que je peux définitivement me sentir rassuré. Bien qu’aucun d’eux n’est boxeur, ce sont de bons bagarreurs – ainsi qu’accessoirement, de vrais fauteurs de troubles. — Yo, Devon ! Désolé pour le retard, me sourit Aaron en s’avançant sereinement vers nous. Pendant ce temps, Blake entreprend une pression avec son pied au niveau de mon dos afin d’éviter que je commette une tentative de fuite. Lorsque les malabars se décident à se débarrasser des intrus, aussitôt, Wade parvient à les mettre à terre grâce à ses lancés de shurikens étant enseveli d’une substance narco– et je me souviens plus de la fin du mot, oups. — Qui êtes-vous ? s’énerve Blake en sortant un flingue. — Oh, toi ! s’exclame Jared en se dirigeant vers l’enfoiré. Sais-tu que c’est vraiment suicidaire de s’en prendre à Devon ? — Ah bon, et pourquoi ça ? — Quoi qu’il arrive, on est là et– Un coup de feu retentit provoquant un sursaut de ma part. Rapidement, je lève la tête pour m’assurer à ce que Jared ne soit pas blessé. Eh oui, en effet, il n’a pas la moindre égratignure. Comme d’habitude. Ce mec arrive toujours à esquiver des attaques d’armes à feu grâce à son temps de réaction plus élevé que la norme. Malgré tout, je ne peux pas m’empêcher d’imaginer le pire des scénarios. Surtout dans de telles situations. — Loupé, dit-il dans un murmure. Tocard. Jared sort un taser de sa poche, et s’empresse d’infliger une forte décharge électrique à Blake. Je décide de regarder autour de moi en remarquant que Chace et Wade se battent contre le reste des agents de Blake. Alors qu’Aaron, n’étant pas un grand adepte des affrontements corporels, se contente de libérer Pearl afin que celle-ci soit en mesure d’aider les autres. Il faut savoir que les gars musclés de Blake sont assez tenaces ! Un simple coup de poing ne suffit pas. Malheureusement. Je les fixe en étant toujours allongé par terre, ventre contre le béton, et remarque la présence de Jared. Il se met accroupi face à moi, et me gratifie un sourire. Au fond, je suis sûr qu’il m’en veut de ne pas lui avoir donné de nouvelles pendant plusieurs jours. J’ai ignoré beaucoup d’appels venant de lui – si bien que je n’arrive même pas à me rappeler du nombre exact. — Tu aurais dû nous prévenir, Devon. Si on n’avait pas suivi les rumeurs sur ta petite escapade à Ravenstein, ta vie aurait été en danger… Nous sommes toujours là pour t’aider, tu le sais ça ? déclare-t-il en gardant une voix calme. Toujours et à jamais, tu t’en souviens ? Je hoche mollement de la tête, vidé de toute énergie. Il m’aide à me lever en mettant mon bras au-dessus de mes épaules – je me retiens de gémir en grimaçant légèrement. Mon regard s’arrête sur le corps de Blake se trouvant actuellement étendu au sol. L’envie de le buter me submerge. Mais, ce besoin – autrefois vital – disparaît. Il n’en vaut pas la peine. Avec ses désaccords avec le gouvernement et l’Agence, ses nombreux homicides volontaires, son enlèvement, et le fait qu’il a violé une personne : cette ordure va assurément croupir en prison. Et c’est bien mieux comme ça. Mon raisonnement m’étonne presque. Quelques mois plus tôt, j’aurai seulement agi sur le moment. D’une manière spontanée et irresponsable. Au bout de plusieurs minutes, la lutte enragée cesse. Les agents de Blake sont correctement attachés avec des menottes, et ont tous été drogués – c’est également le cas pour le salopard. Les flics ont été appelés, et donc, il ne nous reste plus qu’à nous barrer. Mais, à cause de mes blessures, ça risque d’être compliqué. Je n’ai plus de force. Littéralement. Mes membres sont endoloris, et j’ai l’impression que je vais m’effondrer à tout moment. — Il faut l’emmener à l’hôpital ! intervient une voix féminine, et cinq paires d’yeux s’arrêtent sur Pearl. — Devon déteste être soigné dans ce genre d’endroit. Alors, on va plutôt se contenter des bonnes vieilles méthodes ! Une trousse de soins, et basta, rétorque Jared. — Mais… commence-t-elle en croisant ses bras contre sa poitrine. — Désolé, ma jolie, mais on ne change pas nos plans ! fit Chace en essuyant ses mains tachées de sang. Au fait, on va devoir trouver Dark et ses compagnons, ainsi que trouver un endroit où dormir et– Instantanément, mes paupières se ferment. ✽✽✽ « Quel est le son de ma voix ? Je ne m’en souviens plus. C’est vague et nébuleux – frôlant presque le néant total. — Devon, parle-moi… S’il te plait, me demande Thalia en éclatant en sanglots. Dis quelque chose ! Ses pleurs sont exactement les mêmes que ma mère. Douloureux et déchirant. Je la regarde attentivement me supplier de parler, mais tout ce que je trouve à faire: c’est de rester là, complètement immobile. — Oh, ferme ta putain de gueule ! Ce gosse est un cas désespéré, grommelle mon oncle avant de sortir de la maison en claquant la porte contre le ventail. Thalia s’effondre par terre. Tandis que je reste neutre. Je décide de me mettre accroupi devant
Chapitre 27
CHAPITRE 27 Tout me paraît si exotique, si étrange. Le panorama est splendide, notamment grâce aux multiples éclairages ainsi qu’à la grandeur des hôtels de luxe. Ravenstein – ou plutôt, la ville du péché – est plus charismatique que je ne l’aurais cru. C’est la première fois que je viens dans cet endroit : et manifestement, je ne suis pas le seul. Chrissy et Luke sont en pleine euphorie face à tous ces éléments touristiques. Alors que Dark et moi sommes plutôt en position d’analyse, l’exact opposé de Keegan et Elena : en effet, ces deux-là ne semblent absolument pas concentrer à cause de tous ces spots lumineux. Ils marchent joyeusement sur le trottoir, avec des étincelles dans les yeux. Bizamment, la sensation d’être observé accapare mes pensées. Mais, tout compte fait, je décide de faire abstraction de ce détail. Et aussitôt, je soupire bruyamment, enfouit mes mains dans les poches, et suit à contrecœur le groupe de personnes étant beaucoup trop heureux à mon goût. Je déteste les auras positives qu’ils rejettent – puisqu’il est évident que je préfère rester dans le côté obscur ! — Bon, vous avez fini de sourire comme des mongoles ? lâché-je sèchement, et les quatre individus se retournent immédiatement vers moi. Vous commencez à m’énerver. Profitez de la vie en silence à la place d’étaler votre bonheur en gloussant comme des dindes. Ça y est. J’ai craqué ! Il fallait que je dise mon ressenti, parce que clairement, je suis à deux doigts de me barrer d’ici et de me mettre à chercher Pearl par mes propres moyens – en embarquant Dark avec moi, évidemment, il pourrait m’être utile. — Ne sois pas si grincheux, Devon ! Laisse-nous admirer les environs, c’est fantastique. Tu devrais te détendre, souffler un peu, tu en as vraiment besoin, me dit Elena en m’observant avec ce regard rempli d’inquiétude. Je roule des yeux, et décide proposer une idée : — On devrait se séparer. Cette ville est gigantesque, c’est impossible qu’on puisse la trouver si on reste en groupe, dis-je simplement. Moment de réflexion. Ils sont pensifs, probablement pour analyser la fiabilité de mon plan. Est-ce une bonne méthode ? Aucune idée. Tout ce que je sais, c’est que si on continue à se balader comme des cons : on ne parviendra jamais à la retrouver. — Devon a raison, il faut qu’on se disperse, fit Keegan et on se met en ronde. Bien sûr que j’ai raison, bruh ! Quel imbécile celui-là. — Dans ce cas, nous devons faire des équipes de deux personnes, signale Chrissy et tout le monde acquiesce en signe d’approbation. Au bout de plusieurs minutes, les duos sont définitivement formés. Et franchement, j’ignore comment ça s’est passé, mais à la fin, j’ai terminé avec Luke comme équipier. MAIS, WHAT ? Bon, on ne va pas s’le cacher, j’aurais largement préféré être en compagnie de Dark : ainsi, c’est lui qui se charge des gars de la sécurité pendant que je botte le cul à ce satané Blake : alors imaginez-vous ma déception ! Tout mon plan était déjà prêt dans ma tête. Mais, soi-disant, pour préserver une forme d’équilibre, les gens forts au combat doivent être avec les plus faibles. Putain de merde. Par contre, le bon côté des choses, c’est que je ne vais pas me coltiner Keegan – honnêtement, j’éprouve une once de compassion pour Chrissy qui se trouve être son alliée. Mes yeux convergent vers la gauche, et je découvre la différence surprenante entre Elena et Dark – ou Zackary, pour les plus intimes. Ces derniers sont partenaires, de ce fait, je me retiens d’éclater de rire. Si la lieutenante Hopkins savait qui est réellement son coéquipier, je doute qu’elle soit aussi gentille avec lui ! Le grand méchant combattant et la sage officière de police… WOW ! C’est vraiment hilarant dans ce point de vue-là. BREF. Trêve de blablater. Que la chasse commence ! Plus vite on bute Blake, mieux ça sera, tout simplement. Accompagné du grand blondinet, je traverse le passage piéton et commence à examiner les panneaux tout en essayant de lister mentalement tous les lieux dans lesquels un psychopathe pourrait se trouver. Une hypothèse me traverse l’esprit : un hangar abandonné. Mais, ça serait trop simple. En sachant que Blake est imprévisible, ce type d’endroit est extrêmement banal et cliché. Réfléchissons… ! Où pourrait-il être ? Je pense fortement qu’il s’agit d’un lieu écarté des regards parasites des passants. Donc, après plusieurs instants, j’en viens à conclure que Blake ne peut pas se situer au centre de la ville. En revanche, il serait plutôt dans un endroit insolite se tenant à Ravenstein. Mais, lequel ? — En fin de compte, je m’étais trompé. Tu n’es pas un joueur, me lance Luke en observant attentivement les alentours. — Quoi ? À présent, mes sourcils sont froncés afin de dévoiler mon incompréhension face à ses mots. Il ne prend pas le temps de tourner la tête vers moi, et continue de marcher sereinement. — Je pensais que tu allais jouer avec les sentiments de Pearl, admet-il en soupirant. Mais, en voyant tes crises d’angoisse, j’ai réalisé à quel point tu tenais à elle. Je reste silencieux en faisant mine d’être intéressé par les énormes jets d’eau étant admirés par tout un tas d’Asiatiques : le fait que Luke puisse parler de Pearl à ce stade-là des événements me rend assez anxieux pour une raison qui m’est énigmatique. — Tu n’es pas si mauvais, Devon Maxwell. — Qu’est c’t’en sais ? Tu ne me connais pas. — Peut-être, mais il se trouve que c’est Pearl qui m’avait dit ça. — Hein ? — Elle tient également à toi, sache-le. Alors, arrête de te comporter comme un connard avec elle, et sourit. Pearl aime beaucoup ton sourire. Par contre, ça, c’est Chrissy qui me l’a dit. Ces deux-là sont vraiment des pipelettes. Je parie qu’elles passent leur temps à raconter des bobards sur nous, ricane-t-il en persistant à regarder droit devant lui. Je réprime un sourire, et… attendez, minute papillon. Ça ne serait pas
Chapitre 26
CHAPITRE 26 Lorsque la nicotine s’engouffre dans mes poumons, un profond sentiment de satisfaction se repend dans l’intégralité de mon être. Bien que j’aie pleinement conscience des méfaits de la cigarette dans mon organisme, je ne peux pas m’empêcher d’aimer cet éphémère instant de plénitude qu’apporte le tabagisme. Dans une insonorité complète, des spectres grisâtres s’échappent de mes lèvres. C’est alors que la fumée malsaine vagabonde dans l’air avant de disparaître de ma ligne de mire. J’entends la porte d’entrée s’ouvrir, mais je n’y prends pas attention. Mes yeux sont rivés vers le ciel parsemé d’un nombre incalculable d’étoiles. Un raclement de gorge retentit. Et une personne s’installe à ma droite, sur les marches d’escalier. Il s’agit d’Elena. En temps normal, ça aurait été Pearl : tout simplement, car celle-ci était toujours là dans chacun de mes déplacements. D’ailleurs, je lui en ai fait la remarque lorsque j’ignorais qu’elle n’était qu’autre qu’un agent secret… Désormais, je regrette d’avoir dédaigné son omniprésence. — Bonne année, Devon. Sa voix est légèrement rauque, comme d’habitude. N’étant pas vraiment d’humeur, je décide de répondre avec un manque d’enthousiasme sidérant. — À toi aussi, Elena, chuchoté-je d’un ton presque inaudible. Suite à mes mots, cette dernière dépose un plaide au-dessus de mes épaules. Un bref sourire se dessine sur mes lèvres. Cette délicate attention me remonte le moral – ou du moins, un minimum. J’écrase ma clope par terre, tandis qu’Elena pose doucement sa tête sur mon épaule droite. Nous demeurons silencieux pendant plusieurs instants. — On devrait rentrer à l’intérieur pour éviter de tomber malade, conseille-t-elle alors qu’une bande de chats vient apparaître dans mon champ de vision. — Pas maintenant, marmonné-je doucement. Elle souffle : ainsi se forment des nuages de vapeurs étant de couleur lucide. À mon tour, je soupire. Il serait peut-être temps de vous expliquer les faits, non ? Ça fait près d’une semaine que Mini-Hopkins est partie – ou plutôt, qu’on l’a enlevée –, notre quotidien a totalement basculé. Et vous savez… Même si Elena ne le montre pas forcément, il est évident qu’elle tient énormément à Pearl, d’une manière ou d’une autre. Et je suppose que… c’est également le cas pour moi. Son départ a été vraiment difficile : et malgré nos sourires hypocrites, nous ne pouvions pas dissimuler notre morosité. — Au fait, Luke a réussi à dénicher quelques informations sur les amis de Tarek. Et Chrissy est parvenue à voler le portefeuille de l’un d’eux, m’informe Elena afin de me donner une lueur d’espoir. — Et qu’est-ce que Keegan a foutu pendant ce temps ? lui demandé-je en étant toujours autant irrité de devoir collaborer avec lui. — Il demande de l’aide à l’Agence en recrutant des espions qui pourraient nous être utiles en cas d’embuscade, me dit-elle. J’acquiesce mollement. Et me remémorent les dernières paroles en sa compagnie. J’aurais tellement voulu retourner en arrière pour pouvoir m’excuser d’avoir été aussi con avec elle. Je me suis comporté comme un véritable salopard, et pourtant, elle s’est toujours abstenue de me faire du mal à travers mon passé. Pour ça, j’en suis réellement reconnaissant. Et dire que je connais les Hopkins depuis seulement un mois, je n’arrive toujours pas à y croire. Passer mes journées avec elles m’ont permis à les connaître et à les apprécier. Généralement, je ne suis pas ouvert aux gens. En d’autres termes, je ne m’attache à personne – en dépit de ma famille. Elena se lève, et me tend la main. — Aller vient ! Je vais faire du chocolat chaud avec de la chantilly et des marshmallows. J’accepte sa proposition, me lève et m’oriente en direction de la porte d’entrée : et ce, sans me retourner. ✽✽✽ — Tu te fous de ma gueule là ? Ma voix résonne dans le salon tandis que je regarde longuement la fille se prénommant Chrissy. Je tente de discerner une once de rire moqueur, mais rien, nada, walou. Elle fait preuve d’un sérieux renversant. Ceci contraste follement avec ma réaction. Je suis estomaqué, scandalisé, révulsé par cette annonce complètement ahurissante – enfin, pour ma part. Elena et Keegan entrent dans la pièce, suivie de près du grand blondinet, Luke. — Bon. Fais-moi pas chier, et dis-moi si tu connais ce type, me lance-t-elle avec désinvolture. On n’a pas de temps à perdre ! Pearl est en danger, j’te rappelle. Je me ressaisis, et déclare : — Ouais, je le connais. Calvin est un vrai crétin. Il s’est déjà battu contre Pearl, quelques semaines plus tôt, et il a tenté de la tuer à travers un combat à mains nues avec Dark. — Je vois. Puisque vous êtes des connaissances, ça nous facilite la tâche. Il va falloir que tu lui soutires des informations sur Tarek ou bien, dans l’idéal, sur Blake. Est-ce que ça te va ? m’annonce-t-elle sous les regards de tous. — Carrément, ouais, dis-je afin d’accorder mon approbation à son plan. Par contre, comment je fais pour le croiser, maintenant ? — C’est sûr qu’il sera au bar où j’ai volé son portefeuille. Il a dit à Luke qu’il vient là-bas tous les débuts de semaine, fit-elle et je me contente d’acquiescer. Aussitôt, on explique rapidement la situation aux autres afin qu’il sachent ce qu’on s’apprête à exécuter. Calvin est vraiment utile en ce qui concerne la récolte d’information, alors nous avons une chance inouïe de pouvoir retrouver Pearl ! Certes, rien n’est gagné d’avance, mais ça reste tout de même une excellente nouvelle. Étant donné que les services fédéraux sont défaillants sur cette affaire de disparition, Elena compte sur nous pour récupérer sa fille. C’est avec un optimisme inhabituel que je m’engage dans les routes lugubres d’Atlanta pour me rendre dans un bar contemporain accueillant principalement des ivrognes et des joueurs de billards. Assis sur ma moto, je me concentre sur la voiture d’Elena pour ne pas me tromper de chemin. Lorsque l’automobile se gare dans un parking : je ne tarde pas à me stationner dans un coin réservé aux motos – par
Chapitre 25
CHAPITRE 25 Aux premiers abords, je pensais véritablement que ceci était une mauvaise blague. Mais, lorsque je me rends pleinement compte qu’il est question de Pearl : cette idée se résilie immédiatement de mon esprit. Elle n’est pas du genre à faire des farces, surtout dans ce type de situations. Par conséquent, une pointe d’angoisse commence à se créer, provoquant l’augmentation en flèche de mon rythme cardiaque. — Comment ça ? lâché-je tandis qu’elle garde ses mains sur mon bras. — J’ai déjà vu ce gars à plusieurs reprises. Quand j’étais encore scolarisée, il me suivait, murmure-t-elle en fixant le clochard avec méfiance. Il est sûrement un espion de Blake… Alors, il faut faire attent– Elle n’eut le temps de finir sa phrase que je me dirige en grandes enjambées vers l’individu, et ce, une l’allure fulgurante. D’un mouvement ferme, je saisis son col sous le regard déconcerté de la lieutenante Hopkins. Elle m’ordonne de le lâcher, mais je refuse en l’ignorant ouvertement. Et c’est alors que je découvre, après plusieurs instants d’analyse, que cet enfoiré est un imposteur. En effet, il n’est pas réellement blessé. C’est simplement du maquillage – étant par ailleurs étonnamment réaliste. Contrairement à d’autre, comme Elena, j’arrive à reconnaître la différence entre du plasto wax et de la peau. De plus, bien que j’appuie sur ces blessures, ce salopard ne gémit pas de douleur. Quel con ! — Qui t’a envoyé ici, espèce d’enculé ? Je suis indéniablement en colère. Et le sourire malicieux de ce connard n’arrange pas mon état. Je le lâche brutalement afin d’être en mesure d’asséner un violent crochet du droit dans sa face. L’officière émet un cri assourdissant. — Devon ! Arrête ça, tout de suite ! m’ordonne Elena, en rogne. — C’est un putain de menteur. Il porte du maquillage, regarde ! dis-je en me tournant vers elle, pendant que le clodo tente de reprendre son équilibre. — Il a raison, maman. Pearl s’avance vers nous – plus précisément vers l’homme suspecté d’être un agent de Blake. Et immédiatement, elle le fusille du regard lorsque ce dernier se permet de sourire bêtement. JE VAIS LE DÉFONCER ! En dévoilant sa dentition merdique, il cherche à nous provoquer. C’est certain. — Oh, petite garce ! Ça fait longtemps que je ne t’ai pas vu, rétorque-t-il d’un air amusé. Et là, c’en ai trop. Clairement, il est suicidaire. Je lui donne un coup de pied dans le ventre, de ce fait, il tombe brutalement au sol. Dès le moment où il parvient à se lever, j’envoie un second coup au creux de sa joue. Puis, un autre, avant de lui tordre brutalement le bras – ainsi, cet enflure commence à se geindre de douleur. — La prochaine fois, je te tue, soufflé-je doucement pour qu’Elena ne puisse pas entendre. — Ahh. Mec, calme-toi. Je n’ai fait que de saluer Pearl, piaille-t-il. — Ouais, bah j’en ai rien à foutre. Tu crois que je vais te laisser l’insulter, sale fils de pute ? grogné-je en détachant mon emprise. Bien que je sais qu’Elena n’adhère pas du tout à un tel langage, je fais abstraction de son regard de la mort, et me place devant le gars. — Pourquoi es-tu ici ? lance Pearl en se tenant à mes côtés. Il rit machiavéliquement. Putain, il me fait chier là ! Ce n’est quand même pas compliqué de réponse à sa question, merde à la fin. Il se ressaisit de son fou rire, et garde son éternel sourire jaune. Sérieusement, si Pearl et Elena n’étaient pas là, c’est sûr que je serais en train de le tabasser. Je ne supporte pas les gens qui s’amusent quand je suis de mauvaise humeur. Or, après qu’est-ce qu’il s’est passé pendant la soirée, il est évident que je ne suis pas dans un état émotionnellement stable. Ceci pourrait éventuellement expliquer le renforcement de mon impulsivité. Honnêtement, je ne sais pas, et je m’en fiche royalement. Cela n’est pas pertinent. Le clochard me sort soudainement de mes pensées en disant la phrase suivante : — Je suis là pour faire diversion, tout simplement. Euh… what ? Normalement, il n’est pas censé divulguer ce type d’information. — Comment ça ? fit Elena en se situant dès à présent à ma droite. — Je suis chargé de vous distraire. Est-ce suffisamment clair ? déclare-t-il avec lassitude. — Par qui ? le questionné-je. Et une nouvelle fois, il se met à rire. Un acte moqueur. Je déteste ça. Ma colère s’amplifie dans chaque parcelle de mon corps quand j’ai la certitude qu’il se fout carrément de ma gueule. Bon. J’ai une annonce à vous faire : moi, Devon Maxwell, est susceptible de commettre un meurtre. Et ce, sans aucun remords. Voici ma confidence ! — Blake. Il parle de Blake, me chuchote Pearl en baissant les yeux vers le sol. De base, j’suis supposé me calmer pour éviter un énième écrit sur mon casier judiciaire, mais là… ça va pas le faire, en fait. Je serre les poings. Et tente de canaliser au mieux la fureur qui naît au fond de moi. — Bingo ! Tu n’es pas si conne que ça, en fin de compte ! affirme-t-il avec un enthousiasme qui me dégoûte. — Va te faire foutre, enfoiré ! fulminé-je en ne tardant pas à l’étrangler. Elena m’éloigne aussitôt de lui, quitte à entreprendre toutes ses forces. Je prononce intérieurement des injures, et me remets en retrait comme le souhaite Elena. Pearl, quant à elle, se retient également de bondir sur ce bâtard de première. Franchement, si vous étiez à ma place, c’est sûr que votre réaction aurait été la même que la mienne. Ce gars est vraiment détestable – tout autant que Keegan ! — Eh bien, je pense qu’ils ne vont pas tarder à arriver, révèle-t-il en fixant brièvement sa montre. J’ai tellement hâte ! ET BAM ! La porte d’entrée s’ouvre. Je sursaute légèrement suite à cet événement inattendu avant d’essayer d’examiner la personne qui se tient sur le seuil de la demeure – ou devrais-je dire, les personnes. Car oui,
Chapitre 24
CHAPITRE 24 « WE WISH YOU A MERRY CHRISTMAS, WE WISH YOU A MERR– » Et là, c’est plus fort que moi : mon poing s’écrase sur cette satanée boite à musique afin d’être en mesure de cesser cette foutue chanson qui se répète continuellement dans ma tête. Je n’en peux clairement plus. Ma patience a des limites à ne pas franchir, sous peine d’être écrabouillée comme ce machin-bidule chouette typique de Noël. Je présume qu’il est futile de préciser que je déteste cette fête religieuse, non ? Toutes ces guirlandes bouffeuses d’électricité, tous ces sapins moches et inutiles, tous ces cadeaux merdiques et toute cette bonne humeur : ça me donne la nausée. Je n’aime pas ça. Et puis, le simple fait que l’on soit le 25 décembre me met automatiquement en rogne. Pourquoi ? Parce que. — DEVON ! grommelle Elena à la vue de l’émetteur de musique étant dans un piteux état. Tu ne pouvais pas t’abstenir ? C’était le cadeau de tante Agnès ! — M’en fous, lâché-je. Comment ça s’fait que vous fêtez ce truc à la con alors que vous êtes des bouddhistes ? Elle soupire bruyamment, éteint la télévision, et commence à dire : — Toi, alors… grogne-t-elle en me fusillant du regard. (De toute évidence, elle est agacée par mon manque de tact habituel) Nous organisons Noël seulement pour retisser nos liens avec notre famille éloignée que l’on ne voit que très rarement à cause de la distance. Alors, ne t’avise surtout pas de te plaindre ! Suite à l’entente de ses propos, je roule délibérément les yeux, avec la volonté d’attiser davantage sa colère. Bien que je sache pertinemment qu’Elena tient réellement à cette fête de pacotille, je ne peux pas m’empêcher de m’en moquer. Depuis gosse, je n’ai jamais été un grand adepte des soirées entre familles. Contrairement aux autres, je ne ressens pas cette petite étincelle de bonheur lorsque je me trouve auprès de mes proches. Et que ce soit avant ou après la mort de mes parents. Je n’ai jamais éprouvé le besoin de montrer mon affection pour une personne à travers un cadeau pourri. — C’est nul à chier, craché-je en me levant du canapé. — Pour une fois que je suis d’accord avec ce crétin, lance Pearl en débarquant dans le salon. Un sourire satisfait se dessine sur mes lèvres, tandis que je m’avance vers elle pour prendre possession de Pacco – cette bestiole se tient au creux de ses mains. Mais, avant que je puisse m’accaparer de l’écureuil, Mini-Hopkins dévie ses bras afin que je ne sois pas en mesure de porter Pacco. Je grogne doucement lorsqu’un sourire de victoire honore son visage. Elena se redresse sur le canapé, soupire une énième fois, et s’oriente vers nous. — Je me fiche royalement de votre avis ! Ils viendront que vous ça vous plaise ou non. Point final, nous réprimande la lieutenante Hopkins avec une grande conviction. Bon ! Mettez votre mioche dans une cage, et nettoyez la salle à manger. Et que ça saute ! — Je le ferai à condition que je ne me fasse pas passer pour un gars qui s’appelle Victor ! riposté-je en croisant les bras contre mon torse. Vous êtes confus, non ? Laissez-moi vous éclairer. Alors, en fait, comme vous le savez déjà : personne ne doit savoir que je vis dans cette baraque. Du coup, bah, les invités de Hopkins ne font pas office d’exceptions. Et donc, je suis contraint de me dissimuler sous l’identité de Victor Malfoy – par ailleurs, quel nom de merde ! De plus, ceci est inutile, car je doute que des Australiens puissent connaître mon véritable nom. Mais, selon Elena : « on n’est jamais trop prudent. » Pff. Conneries. — Comment veux-tu t’appeler, dans ce cas ? me demande-t-elle. Presque immédiatement, je réponds : — LAMBADA DE BANANA ! — Oh que non ! Ça restera Victor, me dit-elle simplement. Aller, ouste ! Hors de ma vue ! Je veux que ça brille. À ces mots, elle s’en va. Je décide de ne pas lancer un débat pour l’obtention de mon nouveau nom, et pars en direction de la salle à manger. Pearl me rejoint quelques instants plus tard, après avoir déposé Pacco dans sa cage. Un épais silence règne dans la pièce. Je saisis un chiffon, suivit d’un produit ménager et m’attaque à cette foutue table en bois. D’habitude, je ne fais pas ce genre de chose. Du coup, imaginez-vous mon taux de mécontentement à l’heure actuelle ! Durant mon nettoyage, mon bras entre en collision avec un meuble. De ce fait, un vase s’apprête à tomber. Mais, Pearl arrive à temps pour éviter le désastre. D’un mouvement rapide et inattendu, elle attrape l’élément en porcelaine avant de le remettre en place comme si de rien n’était. — Pas mal les réflexes d’agent secret, dis-je d’un air amusé. Ma remarque provoque une multitude de jurons. J’en connais une qui n’est pas de bonne humeur ! Depuis que je sais son secret, celle-ci passe son temps à me mépriser. Elle tente de limiter au mieux nos échanges vocaux. C’est débile, vous ne trouvez pas ? Elle ne me répond pas, et s’abstient de toutes paroles. Ceci a le don de m’énerver. Mais, genre, vraiment. Ça me fait chier qu’elle fasse ça ! Certes, je n’aurais pas dû fouiner dans ses affaires. Mais, je persiste à dire que ce n’est pas de ma faute : c’est plutôt la sienne. Il fallait qu’elle soit plus discrète, c’est tout. — Tu comptes me faire la tête encore longtemps ? la questionné-je en jetant mon chiffon. Aucune réponse. Contrarié, je m’assois sur une chaise, alors que Pearl s’occupe de la décoration. Quand elle est suffisamment près de moi, je saisis son poignet. Aussitôt, elle me repousse et se remet au travail. — Fous-moi la paix, Devon, dit-elle froidement. — Pourquoi t’es comme ça, hein ? j’interroge en la fixant longuement. Un jour ou l’autre, j’aurai su que tu
Chapitre 23
CHAPITRE 23 Oh, putain. Je me retourne immédiatement, avec la respiration saccadée. Mon état, proche de la désespérance, ne s’arrange pas, surtout lorsqu’un tas de questions absurdes me torturent vigoureusement mon cerveau. Pearl n’a pas le droit de faire ça. Ceci ne fait pas partie du jeu. Nous sommes censés être dans la deuxième étape : là où je suis supposé embrasser d’autres personnes pour qu’elle soit jalouse. Et pas le contraire ! Les rôles ne peuvent pas changer… Cela est impensable, irréaliste, inconcevable. Cette idée me révulse. Je… bordel. Je n’arrive pas à être explicite. Mon rythme cardiaque est tellement rapide que c’est comme si je viens de courir le marathon. Je mets mes cheveux en batailles, et tente indomptablement de déchiffrer mon comportement. Titubant jusqu’à l’îlot central, mon attention se focalise sur mon gâteau au chocolat. C’est là que je me fige. Aussitôt, je jette la pâtisserie dans la poubelle. Et même si cela m’est difficile à admettre, je ne suis clairement pas ravie, mais plutôt en rogne. Leur baiser : cette scène m’est si détestable que mon corps me récrimine d’être cinglé. Je suis carrément démunie de toutes idées. Que dois-je faire, au juste ? JE N’EN SAIS RIEN, BORDEL DE MERDE ! Putain, putain, et encore putain. Je suis en train de péter un câble. Mais, pourquoi ? Ce n’est qu’un bisou à la con ! Je n’ai pas à me mettre dans un tel état pour ça, si ? Oula… On se calme ! Trop de pensées tout d’un coup : je n’y suis pas habitué. Donc… Qu’est-ce que je fous encore dans cette cuisine ? Je souffle profondément, et décide de me barrer illico presto de cet endroit pour rejoindre ma chambre. ALLEZ HOP, AU LIT ! Il faut que je rattrape mes heures de sommeil. Il suffit simplement que j’engloutis un somnifère, et le tour est joué ! Je vais pouvoir oublier ce maudit contact buccal, ainsi que ma jalousie inhabituelle. YOUHOU ! ✽ ✽✽ Deux jours se sont écoulés. Et pendant ce court intervalle, je n’ai pas pu m’empêcher d’éviter Pearl. Curieux comme vous êtes, vous voulez sûrement savoir pourquoi, n’est-ce pas ? Eh bien, sachez que je ne vous dirais pas la raison… Non, j’déconne ! À quoi bon les secrets, ça ne sert à rien. Vous connaissez trop de choses sur moi, alors autant tout vous dire ! Ça me paraît logique, quand même ! Vous êtes mes confidents adorés… – ne vous avisez surtout pas de prendre des grades, hein. On va dire que je ne vous déteste pas, est-ce clair ? Ne pensez pas que je vous aime, ou un truc dans l’genre. Selon moi, l’amitié et l’amour ne sont qu’autres que des conneries. Je ne supporte pas ça, eurk. Bon, revenons à nos moutons égorgés ! Le pourquoi du comment de ma méprise à l’égard de la chieuse se résume en une phrase : je ne sais pas – et j’n’en ai rien à foutre. Vous avez probablement des envies meurtrières à cause de ma réponse implicite, non ? Dans ce cas, oups. Honnêtement, je ne suis même pas désolé de vous agacer. Et puis, vous êtes sans doute habitué(e)s par mes pensées impertinentes et sans grande envergure. — Sois sage ! Tu n’as pas intérêt à faire des bêtises, Devon. Si tu oses fuir ou porter atteinte à cette résidence, je… commence Elena en posant sa main sur la poignée de la porte d’entrée. — Ça va. J’ai compris… Tu vas me pourrir la vie et m’obliger à bouffer tes plats dégueulasses, soufflé-je en m’appuyant sur la balustrade des escaliers. — Tu as oublié une chose, me dit-elle en tâchant de prendre un air amusé. Son sourire diabolique détient la fâcheuse tendance de m’irriter. Je roule intentionnellement des yeux, tandis qu’elle attend patiemment que des paroles sortent de ma bouche. Durant une fraction de seconde, j’hésite. La connaissant, Elena serait capable de rester sur le seuil de la porte pendant un long moment, quitte à arriver en retard à son taf. Je soupire bruyamment, tout en gardant ma lassitude éternelle. — Tu vas aussi héberger l’autre connard, et le faire dormir dans la chambre de Pearl. T’es contente là ? dis-je en croisant les bras contre mon torse dénudé. — Oh que oui, je suis plus que contente ! Maintenant que tu as pleinement conscience des conséquences auxquelles tu es confronté, je suis persuadée que tu ne feras rien de mal. Je me trompe, Devon ? rétorque-t-elle avec ses manies malicieuses que je hais plus que tout. — Bordel, tu soûles ! Va à ton travail, lâché-je avec désinvolture. — Ne sois pas si impoli, voyons, me reproche-t-elle. Sa remarque provoque un énième soupir de ma part. Sans plus tarder, je monte à l’étage pour me rendre dans ma chambre. Ainsi, je peux mettre un terme à cette saleté de conversation. Lorsque je me trouve dans le couloir, mon ouïe fut attirée par les éclats de voix provenant de Pearl. Donc, j’en viens à déduire qu’elle est actuellement dans une discussion téléphonique – même si la possibilité qu’elle soit devenue schizophrène est plutôt envisageable. Étant donné que les murs sont fins, je peux parfaitement entendre la formulation de ses phrases – par ailleurs, son sujet de bavardage est vraiment louche. Ça ne présage rien de bon, croyez-moi. J’entre dans ma chambre, m’assois sur mon lit et sors mon portable : tout ça en gardant l’oreille tendue, bien évidemment. — La menace est pire qu’avant. C’est pour ça que M. Underwood m’a ordonné d’abandonner ma mission pour me concentrer sur la type S ! J’ai vraiment trop la mort. Toutes mes études d’adolescentes normales sont perdues, putain. J’étais arrivée à être en dernière année ! Tu t’en rends compte ? J’y étais presque… affirme Pearl avec une certaine forme de déception dans sa tonalité. (À l’entente de ses mots, je fronce les sourcils et me tourne vers le mur séparant nos deux chambres.) Désormais, je suis déscolarisée. Et à vrai dire, M. Underwood ne m’a pas vraiment laissé le choix de l’embarras.
Chapitre 22
CHAPITRE 22 Nous sommes le 19 décembre. Autrement dit, c’est l’anniversaire de Pearl. Et comme je suis un mec gentil et serviable, j’ai décidé de m’attaquer à la confection d’un gâteau. Au début, ça a été compliqué de réunir tous les ingrédients nécessaires : mais, en fin de compte, j’ai réussi ! À présent, une bonne odeur de chocolat s’émane de mon beau gâteau digne des plus grandes chaînes de pâtisserie. Honnêtement, j’en suis vraiment fier. Contrairement à la dernière fois, ce cake est beaucoup plus joli ! Lorsque je dépose mon chef-d’œuvre sur une grille, Elena débarque dans la pièce après avoir passé un soi-disant coup-de-fil. C’est vraiment louche le fait qu’elle se mette à l’écart pour téléphoner, non ? Et qu’à chaque appel, elle revient constamment dépitée – et avec le teint blafard. Comme par exemple, maintenant. — Je suis sûre que ça va plaire à Pearl ! Elle adore le chocolat, lance-t-elle en dissimulant son mal-être derrière un sourire radieux. À l’entente de ses mots, je me contente de sourire avant de décorer prodigieusement la surface marron avec de la ganache afin d’apporter un goût sucrée. Ma concentration est à son apogée. Bien que je ne regarde pas Elena, je sais qu’elle me fixe attentivement avec cet air complaisant : cette attitude me rappelle énormément Thalia. En y repensant, ces deux-là ne sont pas si dissemblables, malgré mon comportement révoltant, Thalia et Elena restent toujours autant attentionnées à mon égard. Et cela m’est réellement rassurant. Dès que je finis mon travail de pâtissier, mon regard s’arrête rapidement sur ses yeux bleutés. — Alors, quelle mouche t’a piqué pour que tu veuilles faire cette délicate attention ? me demande-elle en se levant de sa chaise. — Les mouches ne piquent pas. C’est les moustiques qu’ils le font, affirmé-je en sachant pertinemment qu’elle s’imagine un tas de scénarios délirant. La connaissant, Elena doit certainement penser que j’ai fait un gâteau, seulement pour faire plaisir à sa très chère fille. Alors que ce n’est pas du tout le cas, hein ! J’aime tout autant le chocolat que Pearl. Donc, je n’ai pas galéré à suivre une recette pendant près d’une heure juste pour elle ! Ne vous méprenez pas… ! — Ne changes pas de sujet, jeune homme ! Avoue que tu l’aimes. — Hum… nah. Tu peux toujours rêver, déclaré-je en retirant mon tablier étant ensevelit de farine. — Tu es vraiment incorrigible… grogne-t-elle en roulant des yeux. Comporte-toi comme un homme, merde ! Et cesse de nier tes sentiments. Sinon, Pearl risque de tomber dans les bras de ce crétin de Keegan ! Décidément, elle est têtue comme une mule. Ça fait un moment qu’elle est persuadée que j’ai un penchant pour Pearl, alors qu’à ma connaissance, il ne s’est rien passé entre nous – en dépit du fait que l’on s’est embrassé et que j’ai mis en place un jeu de séduction, bien entendu ! — Attends. Si on récapitule bien, tu préfères que ta fille soit avec un délinquant violent, à la place d’un lèche-cul bipolaire ? — Entre-autre, oui. C’est ça. — Et moi qui pensais que tous les flics sont responsables… J’me suis totalement gouré, rétorqué-je d’un ton amusé. Par la suite, on s’oriente dans le salon. La lieutenante Hopkins s’installe confortablement sur le divan, quant à moi, je m’avance vers la cage de Pacco pour pouvoir le faire sortir, ainsi, il peut pleinement profiter de l’espace de la pièce. Comme à son habitude, il grimpe sur mon bras jusqu’à venir se mettre sur mon épaule droite. Je chatouille légèrement le haut de sa tête, et fini par le poser au creux de mes mains. Je le scrute, l’examine, l’observe : en constatant que son pelage commence à apparaître en abondance. C’est hallucinant de voir à quel point sa croissance est rapide. Un sentiment de nostalgie s’engouffre en moi lorsque je me rends à l’évidence qu’il va falloir relâcher cette petite bestiole dans la nature pour qu’il puisse vivre dans son propre environnement. Même si j’aurais sincèrement voulu adopter ce rongeur, ceci est impossible. C’est illégal. Bon, vous allez sûrement avoir des questions du style : depuis quand tu respectes les lois, toi ? C’est vrai que vous n’avez pas tort. En temps normal, j’aurais violé la règle, mais après plusieurs instants de réflexions, je me suis rendu compte que ceci est pour le bien de Pacco. Il mérite d’avoir une belle vie, une famille avec des mioches et tout ce qui va avec. Après que je me sois placé à droite d’Elena, celle-ci commence : — Il va devoir partir dès le début du mois de printemps. J’entreprends un fugace contact visuel à son égard, et converge les yeux vers Pacco. À ce moment précis, j’éprouve de la tristesse, mêlée à une certaine forme de résignation. Cet écureuil va devoir partir de cet endroit, un jour où l’autre – comme moi. Je ne peux pas lutter contre ça. — Je sais, dis-je simplement. — Il faudrait que Pearl le sache, non ? renchérit-elle alors que je continue de le regarder intensément. — Pas maintenant. Les minutes s’écoulent à une vitesse phénoménalement lente. Il doit être dans les environs de vingt heures, et pourtant, Pearl n’est toujours pas rentrée. De ce fait, Elena et moi avons décidé de manger sans elle, puisque nos ventres ne nous ont pas vraiment laissé l’embarras du choix. J’entame rapidement mon plat de riz, tout en écoutant les anecdotes d’Elena. Étant donné qu’être officière de police n’est pas un métier fastidieux : cette dernière a dû être confronté à des tonnes de situations plus farfelues les unes que les autres. Lorsque je me souviens avec difficulté qu’elle et moi avions déjà entretenu une courte conversation lorsque j’avais douze ans, c’est là que j’éclate de rire. À l’époque, j’avais volé quelques trucs chez un marchand du coin. Rien de très grave comparé à ce que je fais maintenant. — C’était donc toi, ce gamin qui avait ignoré mon coéquipier et qui avait craché sur ces godasses !
Chapitre 21
CHAPITRE 21 C’est officiel : cette fille est suicidaire. Dès lors où elle se tient face à moi, mes yeux se sont plantés dans les siens. J’essaye de discerner ses intentions, en vain. Pourquoi a-t-elle voulu faire quelque chose d’aussi débile, c’est-à-dire, se livrer à un combat avec moi ? Ça n’a aucun sens ! Après tout, il est évident que ses probabilités de me vaincre sont vouées à l’échec. — OH, WOW ! Pour tous celles et ceux n’ayant pas assisté au match, cette jeune demoiselle n’est autre que la gagnante du mythique combat avec Dark ! annonce l’arbitre avec euphorie. Je ne prends pas attention à ses paroles, et continue à fixer longuement l’attitude de Pearl. À mon plus grand étonnement, un sourire mesquin se forme sur ses lèvres pulpeuses étant pigmentées par une couleur rose pâle. Euh, elle est en train de se foutre de ma gueule là, non ? Je serre les poings tandis que le public devient hystérique. — Ce duel risque d’être corsé, croyez-moi ! Le célèbre Devon contre la mystérieuse combattante, ceci est inédit, poursuit le laideron. Les spectateurs sont incontrôlables : ils sont carrément surexcités à l’idée d’assister à cette lutte imminente. Les iris bleutés de Mini-Hopkins me déstabilisent… Que suis-je censé faire maintenant ? Je n’en ai aucune idée. Tout ce que je sais, c’est que je ne compte pas en venir aux mains avec elle. Pourquoi ? Parce que. C’est comme ça. Je n’ai pas à me justifier. Une bagarre entre la chieuse et moi n’est pas envisageable, point final. — Soyez prêts, car le choc va être terrible. Ces deux rivaux sont redoutables. Derrière leur physique de mannequin se cache une âme de guerrier ! À PARTIR DE MAINTENANT, LES PARIS PEUVENT COMMENCER ! À vous de prédire le…. — Ferme ta gueule, putain. Ma voix est d’une froideur sidérante. Un silence envahit l’atmosphère provoquant la paralysie de nombreuses personnes. Je présume que les gens sont indéniablement perdus par mon comportement. Normalement, je devrais être en train d’échauffer mes muscles. Or, à cet instant précis, ce n’est pas le cas. Mon agacement s’amplifie. Le fait que Pearl se porte volontaire pour gâcher ma soirée détient la fâcheuse tendance de m’énerver. Vraiment. Elle n’a pas le droit de faire ça ! Je m’avance dangereusement vers Pearl. Pendant ce temps, tout le monde a le souffle coupé, et pense naïvement que je vais m’attaquer à elle. — Qu’est-ce que tu fous là ? m’exclamé-je en me tenant à quelques centimètres d’elle. — Bah, quoi ? Je suis ici pour me battre contre toi. Ça ne se voit pas ? me dit-elle simplement. Elle me provoque, bordel de merde. Elle a consommé des substances illicites, ou ça se passe comment ? Pearl est devenue folle ! Si on se confronte physiquement, il est incontestable qu’elle sera gravement blessée. Décidément, elle n’est pas normale. — Un problème ? demande doucement l’arbitre. — TA GUEULE ! Je t’ai dit de te taire, qu’est-ce que tu ne comprends pas dedans ? m’écrié-je en me dirigeant vers lui pour saisir son col. — J-Je suis désolé, marmonne-t-il avant de déglutir. Il plaisante, j’espère ? Je lui ai clairement dit de fermer sa bouche et il trouve un moyen de dévier mon ordre. Quel culot. Déjà que je suis vénère, mon état ne s’arrange pas du tout. Je lâche mon emprise, et finis par cracher sur son visage. — J’m’en vais ! Pas question que je me batte avec cette emmerdeuse, lancé-je en m’orientant vers Kendall pour prendre mes vêtements. Lorsque je suis en possession de mes fringues, je descends du ring avant de m’en aller. Les gens me laissent un chemin jusqu’à la sortie pour éviter de se trouver sur mon passage. Quand je suis en rogne, il vaut mieux ne pas attiser ma colère. La situation pourrait dégénérer ! Vous vous demandez certainement pourquoi je me mets dans une humeur si massacrante, pas vrai ? Cette exaspération est due au fait que j’en ai assez qu’on me sous-estime. Dans le cas ci-contre, Pearl a pensé que je suis un adversaire à sa taille – alors que c’est totalement faux. Et ceci me rend vraiment furax. J’enfile mon tee-shirt suivit de ma veste en cuir tout en me dirigeant en grandes enjambées vers ma moto. Le vent glacial me balaye vivement le visage. — Devon, attends ! Qu’est-ce qui ne va pas ? m’interrompt une personne, communément appelée Kendall – ou petite-amie n°1. — Laisse-moi tranquille, grogné-je en me tournant vers cette dernière. — Nous sommes supposés être un couple, merde ! Je peux au moins savoir pourquoi tu es aussi distant ces temps-ci, non ? s’exprime-t-elle en croisant ses bras contre sa poitrine. — T’es sérieuse là ? craché-je en haussant le ton. Qu’est-ce que tu ne comprends pas avec le fait qu’un putain d’assassin veut ma mort, hein ? Qu’on mette les choses au clair, il est hors de question que je reste avec toi en sachant que je peux crever d’une minute à l’autre. Être en ta compagnie, c’est carrément une perte de temps. Alors, maintenant. Dégage, Kendall. Mes paroles ont été prononcées avec une fluidité qui m’étonne presque. Être exécrable avec elle m’aide à me calmer. Désormais, ma colère s’est atténuée. C’est bon signe. Alors que Kendall m’observe avec stupeur, je me contente de former des nuages de vapeur de couleur lucide. Manifestement, mes mots l’ont bouleversé. Elle est incapable d’exposer le fond de sa pensée. Son corps est quasiment paralysé. En fin de compte, il aurait mieux fallu que je sois moins brusque. Il est fort probable que je viens de briser son cœur. Oups. — Tu veux dire que… toi et moi… c’est fini ? bafouille-t-elle. — Ouais, exactement ! Zut, j’ai complètement zappé d’être subtil… Oh et puis merde ! Ça ne sert à rien. Plus vite je la quitte, plus tôt je me casse d’ici. Certaines – ou certains – doivent sûrement penser que je suis un véritable sans-cœur. Eh bien, sachez que vous avez en partie tort. Certes, je reste indifférent face