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J’hésite. Devrais-je descendre ou non ? Hum… Ça laisse à voir. L’idée d’être inquiet vis-à-vis de la situation dans laquelle cette Pearl se trouve ne me plaît pas, mais alors, pas du tout ! Je n’ai pas à me préoccuper d’elle. Il ne faut pas que j’oublie ses airs hautains – ainsi que le fait qu’elle a réussi à contrer mon attaque étant, normalement, infaillible. De plus, je déteste lorsqu’une personne me rappelle qui je suis réellement ; c’est-à-dire, un connard. Autrement dit, toutes mes pensées sont appuyées sur l’envie de ne pas aider cette fille. Mais, je ressens le besoin de savoir l’origine de son cri assourdissant. Un cambrioleur, un assassin ou même, un boxeur ? Toutes les possibilités sont tout à fait plausibles. En fin de compte, ma curiosité l’emporte. En effet, je descends les escaliers. Tout en gardant une attitude décontractée et sereine, bien évidemment !
Et c’est là que je la vois. Debout sur la table basse avec un balai entre les mains. Mais, qu’est-ce qu’elle fout là ?
— Attention ! Devant toi, hurle-t-elle en désignant le sol.
Je suis complètement perdu. De quoi elle parle, putain ? Je soupire bruyamment avant d’apercevoir une souris se diriger droit devant moi. Rectification. C’est plutôt un rat ! BORDEL, QU’EST-CE QUE CETTE MERDE FICHE ICI ? Mais, c’est gigantesque comme bestiole ! Sachez que les événements qui vont suivre ne reflètent pas ma véritable personnalité.
Comme une mauviette, je m’empresse vers la table basse afin de me tenir en hauteur, tout comme la brunette.
— Mais, putain ! C’est quoi ce truc ?
— C’est le rat de Tyson, le voisin d’en face, répondit-elle en tapant de partout avec son balais.
— Il l’a dopé, ou ça se passe comment ? fis-je en cherchant du regard l’animal.
— Peut-être. Je n’en sais rien. Tout ce qui compte c’est qu’on doit le sortir d’ici ! Il est hors de question que je dorme avec lui, dit-elle en lâchant brusquement le balai.
Pearl émet un second cri, égalable à ceux des films d’horreur. Enfin, vous voyez le genre. Mes tympans vont souffrir pendant ce séjour ici ; c’est certain.
— Mais c’est un monstre ! Il vient de mordre le bâton de mon balai, affirme-t-elle, avec stupéfaction.
— Donne-moi le vase là-bas, j’vais l’assommer avec.
— Tiens.
Je saisis l’objet et, lorsque je m’apprête à passer à l’action ; la porte d’entrée s’ouvre laissant découvrir deux personnes. Une fille et un garçon. Leur contraste de taille ainsi que leur différence physique sont surprenants. La meuf a des cheveux bruns, et des yeux marrons noisettes similaires aux miens. Tandis que le gars est blond aux iris bleus comme Pearl.
— Oh crotte de licorne… ! Pearl, peux-tu m’expliquer pourquoi le célèbre DEVON est dans ton salon ? demande l’adolescente venant de débarquer.
— Eh bien, euh. Je, c’est que… tente désespérément de dire Pearl en perdant, au passage, toute sa crédibilité.
Les deux personnes s’avancent vers nous. Pendant ce temps, j’essaye de trouver le rat mutant. Merde, il s’est barré ! Il ne manquait plus que ça… Je lâche un énième juron, et descend de la table, suivi de près par Pearl.
— Wow. C’est tellement bizarre de le voir face à nous. J’crois que c’est la première fois où je ne le vois pas en train de tabasser quelqu’un, remarque le blondinet en s’approchant de moi.
Ces nouveaux arrivants sont carrément en admiration devant moi. Au début, c’est marrant et tout. Mais là, je sens que ça va me faire chier. Si l’un d’eux me demande un autographe, je pète un câble. Ce type de rituel que font souvent les célébrités ; je déteste ça.
La différence entre les stars et moi ; c’est bel et bien la relation que l’on entretient avec nos fans. Contrairement à eux, je ne supporte pas mes admirateurs. Ils sont chiants. Vraiment chiants.
— J’te conseille de reculer si tu veux pas que mon poing finisse dans ta gueule, dis-je, tocard.
— Les rumeurs disent donc vraies, tu es vraiment méprisant ! conclu-t-il.
Il me provoque. Je vais le tuer. Alors que je m’apprête à m’orienter vers le blond pour lui foutre la raclée de sa vie, une main empoigne fermement mon bras. Il s’agit de Pearl. Mais, qu’est-ce qui lui prend, tout d’un coup ? Je détache immédiatement son emprise, et roule intentionnellement des yeux.
— Écoutez, Luke, Chrissy… C’est assez compliqué, et je ne peux pas vous expliquer tout ça, déclare Pearl en s’avançant vers ses amis.
Discrètement, elle les attire vers la porte d’entrée. Pendant ce temps, ladite Chrissy est complètement bouche-bée. Je peux même discerner des étincelles dans ses yeux. Brusquement, la porte claque contre le vantail. De ce fait, les deux chieurs se trouvent à l’extérieur de la résidence. Enfin ! Ils commençaient sérieusement à m’énerver à me regarder avec adoration. Je sais que je suis beau, mais quand même. Il faudrait calmer leur ardeur lorsqu’ils m’idolâtrent.
— Ma mère ne doit pas savoir que mes amis t’ont vue sinon, on est dans la merde ! dit Pearl en verrouillant correctement la serrure de la porte.
— TU es dans la merde. J’en ai rien à foutre puisque ta mère n’a aucun droit sur moi.
— Super la solidarité… Tu pourrais au moins faire semblant d’être sympas, non ? N’oublie pas que l’on doit cohabiter ensemble pendant un moment, ajoute-t-elle en me suivant de près.
Soudainement, je me tourne pour lui faire. Agacé, et à la fois, ennuyé qu’elle puisse m’estimer d’une manière si absurde. JE SUIS DEVON, PUTAIN ! Ce n’est pas si compliqué à comprendre. Faut qu’elle rentre ça dans sa petite tête ; je ne suis pas quelqu’un de gentil et docile. Loin de là.
— Je suis un salopard, point final. La sympathie avec moi ? Tu peux toujours crever, ce n’est pas parce qu’on va vivre dans la même baraque que je vais changer.
Suite à l’entente de mes propos, elle reste perplexe, et n’ose pas ajouter une répartie. C’est bien mieux comme ça. Peut-être que grâce à mes mots, cette fille évitera de faire la chieuse avec moi. C’est dans des pensées plus ou moins positives que je m’oriente dans ma chambre pour roupiller, encore et encore. C’est tellement fastidieux ici. Notamment à cause du quartier ; plus gnan-gnan, tu meurs. Il ne se passe rien d’intéressant ! Aucun coup de feu, aucun combat de nuit, ou même de course de voiture. Rien, nada. Mais, c’est quoi cet endroit paumé à la con ? L’envie de partir d’ici pour établir mes matchs de boxe s’accentue de plus en plus. Par ailleurs, j’ai trouvé un moyen de m’enfuir en douce ; l’arbre à côté de ma fenêtre. Il suffit que je grimpe et le tour est joué ! Ingénieux, non ? Ouais, je sais. Écoutez, c’est dans mes gènes. Soit on est un génie, soit on ne l’est pas !
— DEVON, LES PIZZAS SONT LÀ ! hurle Pearl en se tenant vraisemblablement vers le bas de l’escalier.
19:26. Génial ! Je meurs de faim. Avec un enthousiasme presque sidérant, je descends à toute vitesse les escaliers pour m’orienter vers la salle à manger. Deux cartons de pizza sont disposés soigneusement sur la table. Sans plus tarder, je m’assois avant de saisir une part de ce délicieux repas. Mon ventre succombe rapidement au désir. C’est exquis.
— Tu devrais porter un tee-shirt pour cacher ton torse, rétorque Pearl d’un ton calme et posée.
— Et toi, tu devrais porter un sac pour cacher ta tête, enrichis-je en guise de provocation.
Je savais qu’elle allait faire une remarque là-dessus ! Et manifestement, ma réplique semble avoir causé la naissance d’une colère mêlée à de la désespérance. Elle ne dit rien, mais son regard de la mort en dit longuement sur ses pensées à mon égard. C’est sûr que maintenant elle me déteste. Mais, bon. Ce n’est pas si nous pourrions devenir amis… hein. Ma conscience est actuellement dans un fou rire par cette pensée complètement absurde. Pearl et moi sommes trop différents, c’est assez flagrant. Je n’aime pas les meufs dans son genre ; représentant le cliché même de la fille parfaite.
Un silence pesant s’installe entre nous, jusqu’à qu’il ne soit brisé par elle.
— Euh… Vu que je serai en cours demain, ma mère prendra le relais, annonce-t-elle en entamant son morceau de pizza.
— Ok.
— Mais pour l’instant, tu es sous ma responsabilité alors il est interdit que tu sortes dehors, remarque-t-elle tandis que je manque de m’étouffer.
— Évite de me donner des ordres, dis-je froidement. Sache que je vais me casser d’ici, ce soir. Tu peux me retenir autant que tu veux, dans tous les cas, je ne compte pas passer ma soirée là.
Étrangement, elle ne semble pas étonnée par mes propos.
— D’accord, dit-elle simplement. Tant que tu ne meurs pas pendant l’intervalle où je dois te protéger, ça me va.
Pour une surprise… je ne m’y attendais vraiment pas ! Un problème en moins. C’est bon à savoir. Je n’aurais pas à passer par la fenêtre, c’est déjà ça, hein. Lorsque je finis de manger mon repas, c’est le ventre plein que je m’avachis sur le canapé, sous les regards irrités de Pearl. En effet, désormais, elle est obligée de s’asseoir par terre pour regarder la télévision. Mon attention fut brutalement attirée vers le téléviseur à l’entente du sujet traité dans une chaîne d’information.
— Mets plus fort ! dis-je en me redressant presque immédiatement.
— Ça existe de dire s’il te plait, malpoli va, marmonne-t-elle doucement en augmentant le son.
— … L’enquête avance, mais aucune trace de ce mystérieux tueur de boxeur ! Les services fédéraux sont sur cette affaire depuis près d’un mois, et d’innombrables indices ont été récoltés… Plusieurs victimes potentielles sont actuellement dans un lieu sûr afin d’assurer leur sécurité, comme par exemple, le boxeur Garix Bennett ou encore, le magnifique Devon, annonce la présentatrice rousse.
— Oooh, il parle de toi à la télé ! s’exclame Pearl, avec stupéfaction.
— Shht, lancé-je pour pouvoir entendre la suite des informations de la journaliste.
Ma remarque entraîne l’élévation du doigt central de Pearl, mais je n’y prends pas compte. Je suis beaucoup trop obnubilé par cette chaîne d’infos dont j’ai l’habitude de détester.
— D’après quelques sources confirmées, le meurtrier demeure à l’heure actuelle, à Atlanta. De plus, sa prochaine victime a été officialisée. Il s’agit de Devon, et comme je l’ai dit précédemment, ce dernier est protégé par les forces de l’ordre ! Donc, il se peut que cet assassin songe à changer de cible, mais rien n’est garanti, poursuit la présentatrice avant de continuer, c’est tout pour aujourd’hui. Et voici la météo de Tina Bradford.
Oh, shit. Cet enfoiré persiste réellement à me tuer. Il existe des tonnes de boxeurs à Atlanta, alors pourquoi moi ? Ah, je sais ! C’est évident. Je suis le plus fort de tous. Tout s’explique maintenant. Ce connard veut s’attaquer au meilleur ; c’est logique.
Je me lève vivement, dans le but d’enfiler un débardeur et une veste en cuir se tenant à l’étage.
— Attends, tu ne comptes tout de même pas sortir d’ici, alors que tu sais qu’un psychopathe est à ta recherche ? fit Pearl mais je ne dis rien, et me contente de la regarder en n’exprimant que de l’indifférence. Mais, t’es complètement malade ! Il va te tuer, c’est sûr.
— Arrête de dire n’importe quoi, toi.
Et c’est sûr ses mots que je m’aventure dans les escaliers pour me rendre dans ma chambre. En un temps record, j’enfile un débardeur blanc et une veste. Je n’oublie pas de prendre mon short de boxe avec moi, et descend rapidement les escaliers. De ses yeux pénétrants, Pearl me regarde.
— Ne m’attends pas, je rentrerai tard.
C’est là que je pars d’ici, légèrement étonné qu’elle n’insiste pas davantage. Son devoir est de me protéger, non ? Enfin bon. Bref. Je monte sur ma moto et finit par m’engager sur les routes sinistres de la ville. Les alentours m’importent peu. Je regarde face à moi, et au bout d’une quarantaine de minutes à conduire, je me gare finalement dans l’endroit dont j’ai l’habitude de venir. C’est un hangar.
Au loin, je peux parfaitement distinguer une jolie blonde qui n’est autre que Kendall. Et visiblement, cette dernière semble me chercher, étant donné qu’en temps normal : j’arrive plus tôt. Peu importe. Ce n’est qu’un détail impertinent. J’hésite à la rejoindre, et décide finalement de regarder les environs. Plusieurs personnes se dirigent vers le hangar, de ce fait, cet endroit est blindé de gens. Du moins, plus que d’habitude. Et c’est au bout de quelques instants d’observation que je vois Pearl postée là, droite comme un piquet, au sein de cette foule malsaine. Mais, qu’est-ce qu’elle fout là, putain ? Je vais l’étrangler. C’est sûr qu’elle m’a suivi ! Comment a-t-elle osé… ? Alors que je m’avance dangereusement vers elle ; Aaron, un de mes potes, se précipite vers moi en me disant :
— Devon, il faut que tu t’en ailles ! MAINTENANT. Le meurtrier est là, sous anonymat !
Et, merde.